Pour vous inscrire sur la plateforme de Swiss Leaders, cliquez ici.Swiss Leaders Plateforme
Image_illustration_télétravail_redim.jpg

Télétravail: protégez votre dos et votre nuque

Les études épidémiologiques montrent que sur 12 mois, jusqu’à 70% des employés de bureau ont mal à la nuque. Les douleurs de dos, d’épaule et de poignet ne sont pas en reste. Il semble probable que le télétravail aura plutôt pour effet d’aggraver la situation : essayons de définir quelques pistes d’actions à court et moyen terme pour les cadres.

Comprendre

Les douleurs sont toujours multifactorielles. Il faut considérer 24h/24, 7j/7 :

  • la posture, c’est-à-dire l’utilisation, consciente ou non, de chaque muscle et articulation ;

  • l’activité, dont la dangerosité dépend de l’effort physique (p. ex. port de charges), des conditions thermiques (travail au froid) et de la présence de vibrations. De façon paradoxale, le travail sur écran n’est donc pas « une activité dangereuse » ;

  • l’utilisation du facteur temps : durée entre deux pauses, sur la journée ou sur la vie, mais également vitesse et fréquence des mouvements ;

  • le stress, dû aux caractéristiques intrinsèques d’une situation autant qu’au regard que nous posons dessus, donc à notre personnalité (sommes-nous perfectionnistes, anxieux, etc. ?).

Le verre déborde lorsque a) le stress est maintenu à un niveau élevé pendant des périodes prolongées ou b) parmi les trois risques biomécaniques (posture, activité, facteur temps), deux coexistent.

Pour le biomécanicien, le travail sur écran (ou plus généralement la posture assise) est donc source de douleurs lorsque sont combinées postures peu optimales et durée prolongée (que ce soit parce que les pauses sont rares ou parce que les journées sont trop longues). Et le stress contribuera à mettre de l’huile sur le feu…

Le verre débordera par ailleurs d’autant plus facilement que l’on ne le vide pas assez, et qu’il est de petite taille. Relaxation et entretien de notre condition (physique comme psychique) devraient donc également être à notre agenda.

Prévenir

Derrière un écran, nous devons donc améliorer posture et utilisation du temps, ainsi que tout faire pour réduire le stress. Dans une situation d’urgence comme l’actuelle, c’est dans cet ordre que les batailles doivent être menées : par ordre de facilité, pour ne pas abandonner trop tôt. Nous nous concentrons ici sur la biomécanique, et faisons référence pour la réduction des risques psychosociaux à l’article du 24 mars de notre collègue à l’ASC, Beat Fraefel.

Améliorer sa posture

L’amélioration de la posture se fait en travaillant sur notre matériel (l’ergonomie) et nos habitudes posturales (la posturologie).

Assis, notre attention doit se porter sur deux régions : le bassin, et la nuque.

Le bassin doit être stabilisé afin de donner des fondations solides à la colonne vertébrale. Un bon siège vous permettra donc de rester assis sur les pointes des fesses (les ischions), ceinture calée contre le support lombaire. Il doit donc avoir une assise confortable (exit la chaise dure), pas trop profonde (exit le canapé) et un dossier dont la partie inférieure pourra porter le poids de votre torse (exit le tabouret de bar).

Un accessoire essentiel pour améliorer une chaise de cuisine est un coussin lombaire, que l’on peut improviser en roulant un coussin ferme et en le fixant à la chaise à hauteur de la ceinture.

 

 

La deuxième zone à protéger est la nuque. Il faudra choisir une table qui vous permet d’avoir le clavier à la hauteur des coudes pour garder les épaules détendues. En pratique, les tables de cuisine sont souvent trop hautes : il faudra relever la chaise (p. ex. coussin sur l’assise), puis « remonter le sol » par un repose-pieds (livre, rame de papier, etc.).

Par ailleurs et afin d’éviter une flexion de nuque trop importante, il faudra brancher un clavier et une souris séparés sur l’ordinateur portable, que l’on utilisera alors comme un simple écran en le rehaussant grâce à quelques livres.

Organiser son temps

On connait quelques seuils au-delà desquels le risque musculosquelettique augmente de façon importante : il faudrait se lever toutes les 30 min environ, et il ne faudrait pas passer plus de 6h par jour sur un ordinateur de bureau (ou 2h par jour sur un laptop). Mais il s’agit ici de durées maximales ! Si votre posture n’est pas optimale, que vous avez déjà mal ou que vous êtes stressé ou fatigué, elles chutent drastiquement, mais vous seul pouvez le savoir.

Pour bien s’organiser, il faut donc déjà une dose de philosophie. Il faut

  • savoir que les collaborateurs les plus productifs ne sont pas ceux qui travaillent d’une traite, mais bien ceux qui font des courtes pauses régulières ;

  • observer que la créativité n’est pas proportionnelle au temps d’écran : le cerveau a besoin de s’aérer et de se reposer ;

  • accepter de s’interrompre avant d’avoir mal : les études tendent à montrer que si l’on a mal au dos pendant plus d’une demi-heure, les douleurs ne disparaîtront que le lendemain. Et chacun sait qu’on n’est pas plus efficace quand on souffre.

Les meilleures pauses sont donc les courtes pauses fréquentes. Le temps ainsi libéré permettra de placer des exercices visant à préserver notre condition : exercices de relaxation pour réduire le tonus musculaire, de mobilisation pour préserver la mobilité des articulations, de cardio (par bloc d’au moins 10 min) ou d’aération (aller marcher). Et quand nous reviendrons travailler, ce sera motivé, inspiré et énergique donc plus efficace.

En tant que cadre

Le rôle d’un cadre est de donner à nos collaborateurs accès aux moyens (matériels, informatifs, temporels) dont ils ont besoin pour mettre en place et assimiler les éléments exposés ci-dessus, au bureau comme à la maison.

Mais il est également de ne pas mettre d’huile sur le feu : ceux d’entre nous qui demandent à leurs collègues de leur fournir des rapports d’activités par mail contribuent à alourdir la bureaucratie (donc perdre en efficacité, donc augmenter le stress) et à augmenter le temps d’écran, alors que l’ergonomie est moins bonne à la maison. Privilégier les vidéos conférences et les appels téléphoniques pourra donc être votre première bonne résolution en ces temps troublés.

 


 

Olivier Girard, Fondateur d'Erg'OH Conseil Sàrl

Son expertise en santé au travail et sur les troubles musculosquelettiques fait l'objet de nombreuses conférences, cours, interviews, en Suisse comme à l'étranger. Il est également l'auteur de Plein le Dos - le Manuel de la Posture (Ed. Favre, 2019).

www.ergoh-conseil.ch/