Pour vous inscrire sur la plateforme de Swiss Leaders, cliquez ici.Swiss Leaders Plateforme
arbeitszeit WEcker PC.jpg

Saisie simplifiée du temps de travail – un compromis sans marge de manœuvre suffisante

Le compromis de révision de la saisie du temps de travail dans l'ordonnance sur la loi sur le travail entre le Conseil fédéral, l'Union syndicale suisse et l'Union patronale suisse représente un pas dans la bonne direction – mais pas plus. Il aurait été plus approprié d'entamer cette étape par une révision de la loi et non au niveau de l'ordonnance. Car il n'est plus possible de faire face à une complexité grandissante due à la concurrence globale, à l'ère numérique et à l'individualisation de la société en augmentant la structure et le formalisme dans le travail. Voici la position de l'Association suisse des cadres

L'innovation nécessite une flexibilisation de la politique du travail

La Suisse fait partie des pays les plus innovants au monde. La numérisation et les marchés volatiles vont augmenter la concurrence globale et influencer l'économie, la société et les structures du travail et des organisations. Fréquemment, les innovations ne se font d'ailleurs pas au travers de produits mais bien par des nouveaux modèles commerciaux utilisant intelligemment la technologie moderne. Pour des branches entières, ceci entraîne une nouvelle définition des règles du jeu. Pensons simplement au cloud computing, à l'économie du partage ou consommation collaborative et aux services par Internet.

Ainsi et pour les organisations, la pression d'adaptation augmente afin de perdurer dans la concurrence dynamique. Les organisations linéaires, lentes, fonctionnelles sont mises à l'écart par des structures décentralisées, temporaires de projets et de réseaux. Il est donc logique que ces développements touchent aussi le monde du travail, devenant plus global, transparent, réseauté, mobile et intense en connaissances. Ces dernières doivent être mieux distribuées et plus rapidement, indépendamment du lieu et de l'heure. Les travailleurs du savoir et leur part de près de 50% des personnes actives forment la force vive des innovations. Face à la pénurie de personnel qualifié, ils peuvent choisir le domaine qui leur convient. Ils veulent s'identifier à leur propre activité et à l'entreprise en travaillant sous leur propre responsabilité. Ils ont un grand besoin de flexibilité et désirent allier travail et concept personnel de vie. Les natifs de l'ère numérique ont ouvert la voie: ils réseautent sans se préoccuper du lieu et de l'heure et rassemblent le savoir sur des plateformes numériques.

Si la Suisse veut conserver son avance en tant que pays innovant, elle doit créer des conditions de travail permettant justement ce travail moderne, flexible, du savoir. Ainsi, les deux tiers des participants à l'étude Baromètre RH Suisse 2010 désirent travailler depuis leur domicile, seuls 23% en avaient la possibilité effective. Selon une étude internationale de Dell/Intel, 60% des employés préféreraient évaluer leur travail par sa qualité que par la saisie du temps travaillé.

 

La position de l'Association suisse des cadres

En ce qui concerne la saisie du temps de travail, l'Association suisse des cadres défend la position suivante:

  1. En principe, il serait plus indiqué de s'atteler à une révision de la loi pour adapter les règlements rigides aux besoins actuels du temps de travail et de repos.
  2. La saisie du temps de travail fait sens pour les collaborateurs à haute dépendance de processus opératifs dans lesquels la productivité peut être mesurée en unités de temps. Au vu des modifications mentionnées ci-dessus, la saisie du temps de travail en tant que mesure protectrice n'est pas adaptée au travail du savoir. Les cas de dérives, comme des collaborateurs continuant de travailler après la saisie de fin de travail ne sont pas évités par cette saisie.
  3. Les employeurs et finalement les dirigeants doivent veiller à ce que les collaborateurs soient protégés contre le surmenage. Les facteurs de succès dépendent aussi d'une gestion active et globale de la santé en entreprise, destinée à protéger les employés en les faisant participer au processus, incluant aussi le rôle d'exemple de la haute direction.
  4. Savoir manier les ressources est aussi une question de culture. Dans l'entreprise, promouvoir la culture en faveur de la santé dépend entre autres de la compréhension vécue de conduite, du degré de participation des collaborateurs ou encore de systèmes d'attraits motivants. L'ancrage de valeurs orientées santé dans la culture d'entreprise permet de remettre en question et de modifier les paradigmes existants ayant une influence néfaste sur la santé.
  5. La tâche des dirigeants consiste à donner une orientation, à clarifier des constellations d'intérêts et rôles contradictoires, à soutenir les collaborateurs en tant qu'interlocuteur et à veiller à ce qu'ils puissent participer et travailler en réseau. Pour plus de détails, voir l'article "Führungsverhalten beeinflusst die Gesundheit von Mitarbeitenden" (en allemand)

Vue d'ensemble de l'ordonnance sur la saisie du temps de travail

Vu les changements mentionnés ci-dessus, le compromis pour modifier l'ordonnance sur la loi sur le travail et sur la saisie du temps de travail, semble peu adapté à notre époque.

L'ordonnance est répartie en un article 73a permettant aux employés disposant d'au moins 50% d'autonomie de leur temps de travail et dès un revenu brut annuel de CHF 120'000 de renoncer à la saisie du temps de travail. Toutefois, il doit y avoir une Convention collective de travail (CCT) qui prévoit des mesures particulières de protection de la santé et de respect des pauses prescrites légalement. De plus, un service interne chargé de sensibiliser les supérieurs au sujet des temps de travail et de repos, d'évaluer l'état de la charge de travail tout en soutenant les collaborateurs à ce sujet. Finalement, les employés doivent fournir une déclaration de renonciation. Pour les PME en particulier, ces mesures internes sont coûteuses, sans tenir compte du fait que seule une minorité des PME sont liées à des CCT.

L'ASC considère que la solution par CCT est une voie possible si des solutions par branche pour les mesures internes sont possibles et que le service nécessaire de sensibilisation peut être externalisé.

Quant à l'article 73b de la simplification de l'enregistrement du temps de travail pour toutes les entreprises non affiliées à une CCT, l'ASC est d'avis qu'il est trop bureaucratique et peu ciblé en regard des changements du monde du travail. Dans cette solution également, un accord collectif est nécessaire entre représentants des employés et employeurs ainsi qu'un accompagnement paritaire de mise en œuvre. L'enregistrement simplifié s'applique aux employés disposant librement d'au moins un quart de leur temps de travail. Toutefois, le temps de travail par jour doit être saisi et comme pour l'article 73a, une convention entre employés et employeurs est aussi nécessaire, assurant les mesures de respect des règles de temps de travail et de repos. Ces exigences ne correspondent pas à une culture d'entreprise basée sur la confiance. L'autonomie et ainsi les avantages du travail mobile sont limités, en outre, il existe un danger que le travail de conduite ne se borne à vérifier les heures de travail sans prendre en compte la charge psychique.

 

Pas de société à deux classes, le concept de santé au centre

L'ASC ne comprend pas pour quelles raisons les options concernant le temps de travail dépendent d'une CCT. Un modèle à deux échelons avec saisie facilitée du temps de travail et renoncement à celle-ci pour les travailleurs du savoir et les cadres – tenant compte de l'autonomie du propre travail – doit être possible pour toutes les entreprises.

L'élaboration et l'introduction d'un concept de santé orienté besoins devrait être un devoir pour les entreprises sans affiliation à une CCT si elles désirent profiter des facilités de la saisie du temps de travail. Un concept de santé peut se baser sur des systèmes tels que celui du modèle européen de qualité pour la gestion de la santé en entreprise GSE qui, outre de nombreuses références pratiques, définit différents niveaux de qualité de mise en œuvre et différencie les grandes entreprises et PME. La mise en place doit être régulièrement vérifiée et prévoir des mesures en réseau de l'organisation du travail, la promotion de comportements favorables à la santé ainsi que de sensibilisation et de formations continues spécifiques aux groupes cibles. Un cercle de santé composé paritairement accompagne la mise en place du concept.

Par rapport à l'ordonnance prévue dans le nouvel article 73b, la convention collective serait abandonnée, la déclaration de renoncement concernant la saisie du temps de travail simplifiée et la marge de manœuvre pour l'élaboration du travail du savoir des PME resterait garantie.